Idées de Pierre

Ils ont travaillé toute la nuit.
La statue est maintenant dressée, magnifique,sur son socle
et contemple l’aube qui s’approche.
Pourtant, une légère inquiétude semble,
l’espace d’un instant, troubler la régularité
des traits de son visage marmoréen.
Elle tremble…


Pourquoi m’a-t-on amené ici ?
Qui sont ces gens humbles et soumis
Qui devant moi se mettent à genoux ?
Des hommes en noir s’agitent à mes pieds
Aux airs austères, hallucinés,
Ils sont les seuls à rester debout

Ils s’adressent en me montrant du doigt
A cette foule qui tourne vers moi
Des yeux brillants de crainte et d’espoir

Ils semblent tous m’avoir reconnu
Des pouvoirs étranges et absolus
Je ne suis que pierre blanche, marbre noir.

Que dire à ceux qui louent mon image ?
A ceux qui donnent pour me rendre hommage
Sans que jamais leurs vœux s’accomplissent ?

Le temps passe et je les sens douter
De ma prétendue divinité
Pourvu que cette comédie finisse

Une nuit ils me feront tomber
Du socle sur lequel ils m’ont dressé
Écumant de haine et de rancune

Puis ils en créeront une autre que moi
Qu’ils installeront au même endroit
Pour raconter leurs infortunes

 

Les galeriens

Le navire ennemi est bien visible à présent,
tentant péniblement de gagner le large en dépit du peu de vent.
Le capitaine de la galère est maintenant certain de pouvoir le rejoindre.
Enchaînés sur leurs bancs,
les deux cents galériens attendent l’ordre…

 

La cadence encore s'accélère
Rythmée aux coups de trois comites en colère
Les Galériens exténués
Rament sans voir l'ennemi qu'il faut rattraper
Les soldats, eux, se rassurent
En couvrant le fuyard d'insultes et d'injures.

Le calme est revenu sur la mer
Troublé seulement par des plaintes et des prières
Demain, les tués remplacés
Tous repartiront contre vents et marées
J'ai subi cette vie trop longtemps
Je voudrais rompre ces chaînes, ces fers et ce banc
La cadence encore s'accélère
Rythmée aux coups de trois comites en colère.

Je sais que nous ne quitterons jamais plus cet enfer,
Que nous vivrons nos dernières heures à voguer en mer !

 

L'homme aux sandales

L’Homme aux sandales le millénaire,
L’homme s’emballe et lui met les nerfs.
Venu à pied du fond des âges
Voir où en est son héritage
Vient rectifier sa façon d’être
Avec ce qu’il a laissé sur terre

L’Homme aux sandales, L’HOMME AUX SANDALES !!!

Un empereur est son grand-père
Impitoyable comme Lucifer
L’homme courait face à son devoir,
Accomplissant sa tâche sans déboires.
Il ne faudra pas le décevoir,
L’homme aux sandales revient ce soir !

… Revient ce soir !

L’homme aux sandales le millénaire,
L’homme s’emballe et lui met les nerfs.
Il ne faudra pas le décevoir,
L’homme aux sandales revient ce soir !

 

Le dragon

Certaines traditions religieuses rapportent la défaite d’un monstre
représentant les forces du mal,
souvent un dragon.
Et si ce dragon était toujours le même ?
Et s’il n’avait jamais été vaincu ?
Et si, quelque part dans les campagnes hallucinées,il était toujours vivant ?
Et si…

Seul, dans sa forêt, le dragon lézardé
Veille, inanimé, sur son monde figé.
Mais, sous sa carcasse, attendant son heure,
Bat un coeur pourri, pourri de haine et de rancoeur

Ceux qui sur les routes, détroussent les voyageurs perdus,
Ceux qui dans les bourgs, assassinent au coin des rues,
Ceux, qui dans les champs, ruinent les moissons,
Sont tous devenus des disciples du dragon.

Voleurs, malandrins,
De son antre obscure,
Ont pris le chemin
Sans un murmure...

Graves et tourmentés,
Ils marchent en silence,
Oubliant qu'ils sont voués
A la potence.

Et s'ils communient,
Ils baissent leurs yeux
Bien plus devant lui
Que devant Dieu.

Puis ils partent enfin,
Comme ils sont venus,
Confiants et certains
De ce qu'ils ont vu.

Même Lucifer, avant de se révolter,
Des Cieux était descendu pour le consulter.
Mais le dragon, du fond de son coeur noir,
Maudit tous ceux qui vinrent, viennent et viendront le voir !

 

Sorcière !

Leurs bruits de pas, leurs cris de haine
et leurs coups rageurs frappés à sa porte
ne l’ont pas réveillée.
Elle les attendait. Par la fenêtre,
elle peut les voir, sales et déguenillés.
Lentement, elle prend son châle
sur la chaise  et ouvre la porte...

LE CHEF DU VILLAGE:
Tu as été denoncée,
Pour ton hérésie et tes péchés,
Le village est sans pitié,
L'inquisiteur va arriver...

Sorcière !

LA SORCIERE:
Maudits

LE JUGE:
Le tribunal a écouté
Le témoin et l'accusée.
Après avoir délibéré,
Le tribunal a décidé :

Coupable !

LA SORCIERE:
Maudits ...

 

Ironie II

Où était cachée l’entrée du paradis noir du festin du soir ?
L’idée d’y pénétrer une fois aurait changé la perspective de nous revoir
Hier on a vu combien d’hommes cherchaient en vain cette veine qui débouche sur la foire
Ils sont pourtant mesquins de fuir ce que la raison les amène à croire

Où était cachée l’issue de la forêt noire des chansons à boire
L’idée d’y échapper une fois aurait changé le sens de nous revoir
Demain on verra combien d’hommes chercheront cette faille qui nous mène au boulevard
Ils seront curieux de voir pourquoi la raison les amène à boire

Où sera cachée l’entrée du paradis noir du festin du soir ?
L’idée d’y pénétrer une fois aurait changé en perspective la forêt noire
Demain on verra combien d’hommes transmettront enfin l’aventure du miroir
Ils s’en rendront compte et raconteront longtemps leur désespoir

Ironie Ironie ...

 

Habay road

La route N40 accompagne les automobilistes à travers les Ardennes Belges jusqu’à la bourgade d’Habay, près d’Arlon. Pour les mélomanes,
elle va de please me please me à Let it be

On aurait pu vous parler d’une rue anglaise
De l’Octopus Garden ou d’un champ de fraise
Ce n’est qu’une route traversant les Ardennes
Loin de Liverpool et des forêts norvégiennes

Habay Road - la route des Ardennes
Habay Road - c’est notre Penny Lane
Habay Road - la route des Ardennes
Habay Road - c’est notre Penny Lane

On aurait pu croiser des sous-marins jaunes
Des bus mystérieux et magiques qui zonent
Des types qui planent pour faire chanter leur guitare
D’autres qui triment sur leurs toms pour être Starr

Habay Road - la route des Ardennes
Habay Road - c’est notre Penny Lane
Habay Road - la route des Ardennes
Habay Road- c’est notre Penny Lane

Habay Road.

 

Octobre frappe

Prêt à quitter,
Frisson aux reins,
J'entends mon train
j'suis alarmé,

La ville est sombre,
Il pleut des cordes,
On me reverra,
Tu souffriras.

Chantant la souffrance,
Le chenapan ivre,
Le farfadet danse,
Et glisse dans le givre.

Ils sont malsains,
Ils sont névrosés,
Ooo
Je suis estropié ?

Grandes bottes de fer,
Vieilles chaussures brunes,
Longs bras de fer,
J'exprime mes rancunes?

La nature meurt,
Ténébreuse,
Où sont les heures
Des journées heureuses ?

Octobre frappe,
A la porte de mon âme,
Par ses couleurs et mystères...

Je veux savoir
Toutes les raisons,
Toutes les histoires
De cette saison.

Tes amis sont loin,
Ton avenir est loin,
Que peux-tu faire,
En vendémiaire ?

Les reins poignardés,
Un promeneur perdu,
Dans un dédale,
Tu loublieras ?

Octobre frappe,
A la porte de mon âme,
Par ses couleurs et mystères...

 

Toxicowoman

Elle plane dans un nuage toxique de regrets,regrets,
La défonce est sa religion
Elle met sa vie en danger
Elle vit dans une grande confusion
Elle est un fantôme de tristesse
Elle lance sa fusée de détresse

Ooh toxicowoman

Vivant dans une réalité parallèle,
Voyant ce qu'elle veut là où elle veut
Personne ne pense plus à elle,
Elle se construit un monde bienheureux
Obéissant à son puissant démon,
Elle a déjà touché le fond

Ooh toxicowoman

Planant dans un nuage toxique de regrets,
Elle n'a pas voulu croire ce qu'elle a vu,
La vie est pleine de dangers,
Toutes les séductions sont dans la rue.